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Acid

The exhibition is supported by The Centre National des arts plastiques (CNAP)

07.09 _ 15.10.2023

S’allonger dans l’herbe et regarder les nuages en mangeant des bonbons. Voilà le type de souvenir d’enfance idéalisé qu’évoque en premier lieu l’exposition de Léo Luccioni. Tendre et ludique, elle a le goût des souvenirs. Ceux des anniversaires, d’Halloween, des fêtes foraines ou des sorties d’école. Des ciels bleus parfaits aux nuages blancs dodus, des bonbons et friandises taille XXL aux couleurs savoureuses. L’espace de la galerie transformé en décor de rêve pour enfants. Oui mais. Plus on scrute les œuvres, plus l’illusion s’estompe. L’artiste joue avec le phénomène visuel de la paréidolie qui consiste à percevoir dans la nature des formes familières souvent animales ou humaines. Ici pas d’oiseaux, de visages ou de dinosaures cachés dans les nuages. À la place : des logos, des typographies et autres personnages de marques de l’industrie du sucre. Des formes que nous avons vues sur les paquets de bonbons, dans les rayons de supermarché ou les publicités. Une iconographie que notre mémoire a ingéré aussi bien que les produits vendus. Qui soudain nous rappelle à quel point notre imaginaire visuel est colonisé dès l’enfance. Avec cette esthétique acide kitsch qui caractérise souvent son travail, leurs couleurs pop et leur brillance effet 100% gélatine, les sculptures de Léo Luccioni ont tout pour stimuler la mémoire et les sens. C’est précisément cet effet, ce désir que la seule vue du sucre suscite dans notre cerveau que l’artiste cherche à provoquer. Dopamine. Mais « l’hormone du bonheur », du plaisir immédiat est aussi celle de l’addiction. Représentés ainsi, reproduits fidèlement mais surdimensionnés, appétissants mais parodiques, les bonbons laissent apparaître toute leur ambiguïté.

Étrange monde sucré où l’on dévore par poignées dans des sachets colorés : des diables, des œufs au plat, des langues, des colliers de perles, des mûres, des crocodiles, des dents de Dracula, des réglisses spirales, des framboises, la célèbre Schtroumpfette, des melons, des arcs-en-ciel, des spagheds, des soucoupes volantes... Étrange monde où l’on incite dès l’enfance à la consommation du fun et du plaisir permanent sous prétexte de confiseries innocentes. Quitte à l’associer sans scrupules au champ lexical de la violence et de la destruction : « Sour Bomb », « Warhead », « Têtes Brûlées », « Toxic Waste »*. Où à grands renforts de visuels et typos colorées on suscite envie, désir et addiction. Où derrière des formes amusantes et des goûts dits « inimitables » se génèrent très tôt des habitus de consommation en même temps que des super-profits. L’exposition porte dès son titre toute l’ambivalence de notre rapport au sucre. Et le désenchantement s’opère à mesure que l’on s’imprègne des œuvres. ACID a exactement ce double effet. D’abord séduisante, elle rappelle que derrière l’alléchante vitrine se cache une réalité bien plus dérangeante. Celle d’une industrie usant du marketing et de la communication pour conquérir nos sens, modeler notre imaginaire et dominer nos désirs pourson seul bénéfice. *Noms et marques de bonbons existants

Tania Hautin-Trémolières

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